Première ministre Paetongtarn Shinawatra suspendue de ses fonctions

Depuis plus de vingt ans, la vie politique thaïlandaise est rythmée par les hauts et les bas d’une seule et même famille : les Shinawatra. À la tête d’un mouvement populiste puissant, mêlant charisme, promesses sociales et héritage controversé, Thaksin Shinawatra et ses proches ont longtemps dominé le paysage politique du royaume. Mais le dernier coup de théâtre pourrait bien sonner le glas de cette dynastie.

Le 1er juillet, la Cour constitutionnelle thaïlandaise a suspendu de ses fonctions Pae Thongtarn “Pongtan” Shinawatra, fille cadette de Thaksin et actuelle Première ministre, à la suite d’un scandale diplomatique qui a enflammé l’opinion publique.

📞 Une fuite qui fait trembler le pouvoir

Tout commence par une fuite audio mi-juin : un enregistrement d’un appel téléphonique entre la Première ministre et Hun Manet, Premier ministre cambodgien, dans le contexte d’un différend frontalier tendu entre les deux pays. Lors de cet échange, Pongtan adopte un ton jugé trop conciliant avec son homologue cambodgien, allant jusqu’à critiquer l’armée thaïlandaise.

Ce qui devait être une tentative d’apaisement est perçu comme un aveu de faiblesse. Les conservateurs hurlent à la trahison, les alliés politiques fuient. Le parti Bhumjaithai, principal soutien de sa coalition, se retire. Malgré des excuses publiques, les manifestations se multiplient, et la pression s’intensifie jusqu’à cette décision judiciaire qui bouleverse l’équilibre déjà fragile du gouvernement.

📉 Une popularité en chute libre

L’opinion publique ne pardonne pas. Selon les derniers sondages, la cote de popularité de Pongtan chute brutalement de 30,9 % à 9,2 %. Son parti, le Pheu Thai, autrefois pilier de la scène politique, plonge à la troisième place des intentions de vote, loin derrière un nouveau venu : le People’s Party, héritier du défunt Move Forward Party, qui caracole en tête avec 46 % de soutien.

Ce rejet ne vise pas seulement Pongtan, mais toute la stratégie politique de la famille. À 38 ans, elle est perçue comme trop jeune, inexpérimentée et placée là uniquement pour servir d’héritière. Une marionnette de plus dans une famille dont le chef, Thaksin, continue d’agiter les ficelles depuis l’ombre.

⚖️ Le poids d’un passé tumultueux

Thaksin Shinawatra, ancien Premier ministre élu en 2001, exilé après un coup d’État en 2006, est revenu au pays l’an dernier dans un deal politique sulfureux. À peine revenu, sa peine de prison a été réduite puis symboliquement purgée à l’hôpital avant d’être gracié par le roi. Une manœuvre qui a choqué même les partisans les plus fidèles du Pheu Thai.

Pire encore : Thaksin fait désormais face à de nouvelles accusations, notamment pour insulte à la monarchie dans une interview donnée en 2015. L’homme fort d’hier, âgé de 75 ans, est affaibli. Sa famille semble à court de figures crédibles. Et le peuple, lassé de ces jeux d’influence, semble vouloir tourner la page.

🔄 Vers un changement de paradigme ?

La suspension de Pongtan pourrait bien marquer la fin d’un cycle. Une ère où le pouvoir alternait entre coups d’État militaires et retours en force du clan Shinawatra. Cette fois, les cartes sont rebattues. Le bloc conservateur reste puissant, mais fait face à une nouvelle opposition structurée et populaire, bien décidée à imposer des réformes progressistes, notamment sur le rôle de l’armée et la sacralité de la monarchie.

Le risque d’un nouveau coup d’État n’est pas à exclure. Mais le scénario d’un gouvernement de transition jusqu’à de nouvelles élections semble plus probable. Dans tous les cas, la Thaïlande entre dans une zone de turbulences politiques, avec des conséquences incertaines pour sa stabilité intérieure et ses relations internationales.

🇫🇷 Et pour les expatriés français ?

Pour les Français installés en Thaïlande, cette instabilité ne devrait pas entraîner de bouleversements immédiats. Mais il est conseillé de rester attentif à l’évolution de la situation, notamment en cas de manifestations ou de changements politiques majeurs. Une paralysie parlementaire ou un changement de régime pourrait avoir un impact indirect sur les conditions économiques et les politiques liées aux visas ou à l’investissement étranger.

📌 En résumé :

• Pongtan Shinawatra, Première ministre, suspendue après un scandale diplomatique ;

• Forte baisse de popularité pour elle et son parti, le Pheu Thai ;

• Retour difficile de Thaksin, désormais poursuivi pour lèse-majesté ;

• Montée en puissance du People’s Party, opposition progressiste ;

• Risque de blocage politique, voire d’intervention militaire ;

• Une dynastie sur le déclin, et un royaume en pleine mutation.

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